Le Bureau EBAA France | De gauche à droite : Nicolas Fischel, Charles Aguettant, Paul Tiba, Sarra Kriai, Nicolas Ziza, Dannys Famin

À l’issue de son Assemblée Générale, l’EBAA France a tenu, mardi 13 mai, sa première grande conférence à Paris, réunissant les principaux acteurs de l’aviation d’affaires, des aéroports français, de la DGAC ainsi que l’ancien ministre des Transports Jean-Baptiste Djebbari et le sénateur Vincent Capo-Canellas. L’événement a permis de dresser un état des lieux sans détour d’un secteur à la croisée des chemins.

Des débats de fond sur la fiscalité, la transition et le rôle territorial

Deux grandes tables rondes ont rythmé la journée. La première a souligné l’incompréhension croissante entre la réalité de l’aviation d’affaires et sa perception dans le débat public. En effet, si l’aviation d’affaires représente 250 000 mouvements par an en France — soit 9 % du trafic — et près de 100 000 emplois directs et indirects – soit 25% des emplois du secteur en Europe, elle reste victime d’une image caricaturale et d’un traitement politique souvent injuste. Les intervenants ont notamment dénoncé un traitement fiscal déséquilibré, marqué par la hausse massive de la TSBA (Taxe de solidarité sur les billets d’avion) sur les vols d’affaires. Dans certains cas, la taxe a été multipliée par 700, fragilisant ainsi gravement les compagnies et leur écosystème et décourageant l’investissement en France.

La seconde table ronde a, quant à elle, mis en lumière l’impact territorial de l’aviation d’affaires. Outil de désenclavement, de réactivité économique, de soutien au tissu local, elle constitue un levier souvent ignoré du développement régional. L’EBAA France appelle à décentraliser le débat politique et à replacer les territoires au cœur de la réflexion sur l’avenir du secteur.

L’EBAA France appelle à sortir des postures politiques

Alors que les débats sur le Projet de Loi de Finances 2026 devraient être entamés dans les prochains mois, l’EBAA France alerte sur les risques d’un empilement de mesures dogmatiques mais contre-productives. L’association ne rejette pas l’idée d’une juste contribution du secteur, mais appelle à plus de cohérence : une fiscalité mieux ciblée, fléchée vers la transition énergétique du secteur, et une réglementation adaptée aux réalités industrielles.

« L’aviation d’affaires souffre souvent d’une image injustement caricaturale. Elle est associée à l’élitisme, à l’inutilité, voire à l’excès. Or, nous savons que la réalité est tout autre : notre aviation est au service des territoires, de l’industrie, de l’urgence, de la cohésion et de l’économie de notre pays. » a rappelé Charles Aguettant, Président de l’EBAA France.

A travers ces conférences, l’EBAA France a tenu à faire passer un message clair : loin des dogmatismes politiques, l’association poursuivra son engagement pour porter la voix de l’aviation d’affaires, défendre les métiers du secteur, et valoriser le rôle stratégique que joue cette industrie dans l’économie et l’aménagement du territoire.

Tous ont rappelé que 90 % des opérateurs ne sont pas propriétaires de leurs avions, mais agissent pour le compte de clients ayant un véritable besoin de mobilité — médicale, économique ou territoriale. Pour Jean-Baptiste Djebbari, cette dérive fiscale est « la quintessence d’un débat biaisé et peu éclairé, dont les conséquences économiques sont durables. »


Discours d’ouverture | Conférence EBAA France par Charles Aguettant, président d’EBAA France

Monsieur le Ministre,
Monsieur le Sénateur,
Mesdames et Messieurs les Directeurs,
Chers membres, Chers partenaires, Chers amis,

C’est avec une grande fierté et une profonde reconnaissance que nous vous accueillons aujourd’hui à la première conférence de l’EBAA France.

Nous tenons à vous remercier toutes et tous pour votre présence, qui témoigne de l’importance que vous accordez à notre filière, à ses enjeux et à son avenir.

Alors même que nous venons de terminer notre Assemblée Générale, nous avons devant nous deux tables rondes riches de réflexions, je l’espère, d’échanges et de perspectives.

C’est un après-midi pour nous rassembler, confronter nos idées, partager nos expériences, mais aussi pour continuer à bâtir des solutions concrètes pour notre avenir, mieux comprendre notre environnement et les attaques injustifiées qu’il subit.

Notre secteur est à la croisée des chemins. Il est exposé, questionné, parfois incompris, et pourtant, il demeure indispensable.

L’aviation d’affaires est bien plus qu’un moyen de transport, c’est un vecteur de croissance, de réactivité, de souveraineté économique et sanitaire.

Elle relie les territoires, soutient l’activité des entreprises, permet des interventions médicales ou humanitaires dans des délais que seule elle peut offrir.

Aujourd’hui, nous avons choisi d’articuler nos travaux autour de deux grandes tables rondes qui incarnent pleinement l’actualité de notre secteur :

Première table ronde : L’aviation d’affaires en France et en Europe : entre évolution et adaptation

Ici, nous aborderons la situation du secteur à l’échelle nationale et européenne, dans un contexte où les attentes sociétales et réglementaires se renforcent.

  • Quelle place pour l’aviation d’affaires française dans le paysage européen de demain ?
  • Comment répondre aux impératifs climatiques sans sacrifier la connectivité et la compétitivité ?
  • Quel rôle pour les institutions, les opérateurs, les associations comme la nôtre ?

Autant de questions essentielles qui, je n’en doute pas, guideront nos échanges.

Deuxième table ronde : L’aéroport comme outil de développement régional face aux enjeux actuels

Nous parlerons ici de territoire, de proximité, de résilience. Car il ne peut y avoir d’aviation d’affaires sans infrastructures adaptées, durables, modernes, intégrées à leur écosystème local.

Les aéroports sont des catalyseurs d’activité économique, d’attractivité et surtout de nombreux emplois dans les territoires en France.

Comment peuvent-ils se réinventer pour répondre aux défis environnementaux, à la pression foncière, à la nécessité de mieux dialoguer avec les riverains et les collectivités locales ?
Là encore, le débat promet d’être riche et concret.

Ces deux grandes thématiques ne sont pas indépendantes. Elles reflètent les trois défis fondamentaux auxquels notre filière est confrontée aujourd’hui :

D’abord, un défi de perception

L’aviation d’affaires souffre parfois, et même souvent d’une image injustement caricaturale. Elle est associée à l’élitisme, à l’inutilité, voire à l’excès.

Or, nous savons que la réalité est tout autre : notre aviation est au service des territoires, de l’industrie, de l’urgence, de la cohésion et de l’économie de notre pays.

À nous de mieux l’expliquer, avec transparence et pédagogie.

Ensuite, un défi environnemental

Nous devons montrer que nous ne sommes pas des spectateurs passifs de la transition écologique, mais bien des acteurs engagés.

Le développement des carburants d’aviation durables, les SAF, l’amélioration des performances énergétiques, la modernisation des flottes, la digitalisation des opérations qui permet entre autres de réduire les trajectoires de nos avions et l’empreinte carbone, tout cela est déjà en marche comme vous le savez.

Mais il nous faut accélérer, et le faire collectivement, avec l’aide des pouvoirs publics avec l’Aviation Civile et les industriels et tous les acteurs de notre secteur.

Il nous faut bien entendu le faire savoir car nous sommes le secteur qui décarbone le plus vite et permettra aux autres secteurs de décarboner.

Enfin, un défi d’avenir

Nous devons renforcer l’attractivité de notre filière, former de nouveaux talents, promouvoir la diversité des parcours, ouvrir notre secteur aux jeunes générations qui cherchent du sens et bien entendu féminiser notre secteur.

L’aviation d’affaires est une vitrine technologique, mais aussi une aventure humaine. Elle mérite d’être mieux connue, mieux comprise, et surtout mieux valorisée.

Mesdames et Messieurs,

Ce que nous faisons aujourd’hui ici ensemble, ce n’est pas seulement dresser un état des lieux. C’est construire une stratégie d’avenir, une vision partagée et une dynamique collective.

L’EBAA France, en collaboration étroite avec l’EBAA Europe, est là pour fédérer, représenter notre industrie dans les instances européennes et Françaises.

Nous avons un rôle à jouer, non seulement pour défendre notre activité, mais pour l’adapter, la réinventer et la projeter dans le temps long (dans l’avenir ?) tant au niveau National qu’Européen.

Le nouveau bureau de L’EBAA France en place depuis avril 2024 n’a pas eu de répit et reste motivé plus que jamai

À peine avions-nous commencé notre travail que notre secteur s’est vu discriminé à travers une nouvelle catégorisation de l’aviation d’affaires dans la taxe de solidarité sur les billets d’avion lors d’élaboration du PLF 2025.

Avec la FNAM dont nous avons la chance d’avoir à nos côtés tout au long de l’année, nous avons travaillé de concert sur les sujets d’actualité et je remercie Pascal de Izaguirre et Laurent Timsit ainsi que leurs équipes pour leur soutien actif et leur présence aujourd’hui.

Je remercie également l’Union des Aéroports Français & Francophones Associés, avec qui nous avons pu bâtir une nouvelle relation de complémentarité et d’échanges pour nos aéroports d’affaires en France. Merci à Thomas Juin et Nicolas Paulissen pour leur présence parmi nous, qui montre qu’ensemble nous avancerons mieux.

La DGAC, représentée notamment par Emmanuel Vivet aujourd’hui, a été à l’écoute de nos problématiques. L’Ebaa France travaille quotidiennement avec ses différents services afin de leur permettre une meilleure compréhension de notre Aviation d’Affaires.

Les sujets sont vastes : des limitations de temps de vol des pilotes de notre secteur (Flight Time Limitations) à la TSBA, en passant par la mise en place des coordinations d’aéroports, d’accords de réciprocité — comme avec les États-Unis dans le cadre de la 5e liberté — mais aussi dans la lutte contre le transport public de passagers illicite, qui nuit à notre image, notamment depuis l’accident de l’avion d’Emiliano Sala en 2019 et enfin les points de passage frontaliers sujet complexe, mais qui permet le désenclavement de nos territoires.

C’est également avec la DGAC que nous avons pu traverser la crise sanitaire de la covid 19, en mettant en place des protocoles adaptés à l’aviation d’affaires.

L’EBAA France, tout au long de cette année, s’est rapprochée des institutions publiques avec lesquelles nous avons pu nouer un dialogue constructif et éclairé : le ministère des Finances, du Budget, des Transports, Matignon, l’Assemblée nationale et le Sénat.

Je remercie tout particulièrement le Sénateur Vincent Capo-Canellas, présent aujourd’hui, pour son écoute au cours des 12 derniers mois et son action auprès du gouvernement, qui nous a permis d’être entendus.

Je tiens à remercier tous les intervenants des tables rondes d’aujourd’hui, nos partenaires — Jetex, Gogo, JSSI et TotalEnergies — ainsi que le bureau de l’EBAA France et Marlène, qui ont œuvré à l’organisation de cette journée pour vous.

Enfin, nous avons le plaisir d’avoir parmi nous Gérard Feldzer et Marine Gall d’Aviation sans Frontières qui comme vous le savez met toute son expertise et ses ressources logistiques Aéronautique à la disposition des ONG et des acteurs de l’humanitaire.

Aviation sans Frontières a été fondée il y plus de 40 ans par des pilotes et mécaniciens navigants.

Aviation Sans Frontières c’est surtout le transport de plus de 600 enfants en urgence de soins, l’acheminement de médicaments, de produits de première nécessité et elle participe à des opérations d’aide humanitaire avec une présence assidue en Centre Afrique.

Avec la récente pandémie de Covid 19 l’aviation d’affaires s’est mobilisée massivement pour le transport des personnels soignants vers le Grand Est de la France avec Aviation sans Frontières.

Bon nombre de nos propriétaires d’avions ont mis gracieusement leurs avions à disposition des soignants rendant possible leurs missions et nous les en remercions ici.

Enfin ASF à un grand projet d’avion hôpital dont le lancement sera annoncé au salon du Bourget.

Cet avion aura pour vocation d’aller au plus près des populations les plus démunis pour leur apporter des soins de vaccination, de dentisterie, d’ophtalmo et de gynécologie.

ASF organisera le 18 juin une vente aux enchères chez Artcurial ce sera l’occasion pour ceux qui le souhaitent de se retrouver autour de magnifiques lots. Je ne vous en dit pas plus mais vous pourrez en discuter après la réunion avec Gérard Feldzer et Marine Gall.

Au nom de l’EBAA France, je vous souhaite à toutes et à tous une excellente conférence, pleine d’idées, de débats et je vous invite à nous retrouver ensuite autour d’un cocktail pour poursuivre nos échanges.

En attendant, je cède sans plus attendre le micro à Frédéric Béniada qui va animer les 2 tables rondes et vous présenter les intervenants.