Souvent cantonnée à l’image réductrice de jets privés réservés à une élite, l’aviation d’affaires continue de pâtir d’une perception biaisée. Pourtant, derrière ce cliché nourri par les réseaux sociaux et certaines figures médiatiques, se cache une réalité bien plus complexe : un secteur discret mais essentiel, qui soutient l’économie locale, assure des missions de santé d’urgence, renforce la connectivité des territoires et s’engage dans la transition écologique.
À l’occasion du récent Salon du Bourget, Charles Aguettant, Président de l’EBAA France, et Charles Clair, Président d’Astonjet, ont partagé en vidéo avec Gil Roy (Aérobuzz) leur lecture du présent et leur vision d’avenir pour l’aviation d’affaires. Retour sur cet événement et décryptage d’un secteur en mutation.
« L’aviation d’affaires, ce n’est pas que Taylor Swift dans son Falcon. »
Dans l’immense majorité des cas, les vols d’affaires répondent à des impératifs strictement professionnels. Il s’agit de permettre à des dirigeants, ingénieurs, techniciens ou experts d’enchaîner plusieurs rendez-vous dans des zones souvent peu desservies par les transports classiques. Loin des idées reçues, ces voyageurs privilégient les lignes régulières ou le train dès que cela est possible. L’aviation d’affaires intervient ainsi comme un levier de mobilité complémentaire, permettant d’optimiser les déplacements et de maintenir la compétitivité dans un monde où chaque minute compte.
« L’image de l’aviation d’affaires est tronquée par les réseaux sociaux et par certaines expositions médiatiques de célébrités qui montrent ce genre de moyen de transport. Aujourd’hui l’aviation d’affaires ça n’est pas ça. Dans plus de 80% des cas, ça n’est pas du loisir, ce sont des hommes d’affaires qui ont besoin de se déplacer d’un point A à un point B. » – Charles Clair
Un levier de développement pour les territoires
L’un des grands atouts de l’aviation d’affaires réside dans sa capacité à connecter les territoires oubliés des lignes commerciales. En France, environ 500 aérodromes et petits aéroports accueillent des vols d’affaires, souvent dans des zones rurales, industrielles ou enclavées.
« L’aviation d’affaires c’est avant tout l’aviation des territoires, on va principalement là où l’aviation régulière ne va pas. Dans 90% des cas on décolle et on atterrit d’aéroports qui ne sont pas desservis par des compagnies régulières. » – Charles Clair
Cette aviation de proximité contribue à maintenir l’activité économique dans les régions, à faciliter l’investissement, à soutenir des projets industriels et à créer des emplois non délocalisables dans les filières aéronautiques, logistiques ou de maintenance.
Un rôle vital dans les missions médicales
Parmi les usages les plus méconnus de l’aviation d’affaires figure le transport sanitaire et le transport d’organes. Ces missions, souvent réalisées dans l’urgence, nécessitent une réactivité maximale et une logistique parfaitement maîtrisée. Ce sont des vies sauvées chaque jour grâce à la souplesse de ces avions, capables de décoller de nuit et d’atterrir au plus près des hôpitaux.
Vous souhaitez tout comprendre du volet sanitaire de l’aviation d’affaires ? Voici l’article que nous avons consacré au sujet !
L’innovation au service de la transition écologique
Loin des idées reçues, l’aviation d’affaires s’affirme comme un acteur proactif de la transition écologique. Le secteur intègre déjà les carburants durables (SAF – Sustainable Aviation Fuel) dans ses opérations, parfois jusqu’à 100 %, bien au-delà du seuil réglementaire actuel de 2 %.
Des appareils de nouvelle génération, comme le Falcon 10X, sont désormais conçus pour fonctionner exclusivement avec ces carburants décarbonés, incarnant une nouvelle ère pour l’aviation.
« La décarbonation ce n’est pas un seul type de motorisation ou de carburant. C’est un ensemble d’actions qui sont mises en œuvre. Avec l’aviation d’affaires on peut incorporer plus de carburant durable que le régulier et on évolue déjà là-dessus pour faire en sorte que les nouveaux avions puissent prendre 100% de SAF. Mais à côté de cela, il y a également toutes les nouveautés (hydrogène, hybride etc.) qui sont les avions de demain. » – Charles Aguettant
Le Salon du Bourget a permis de mettre en lumière ces avancées, notamment à travers des projets innovants d’avions hybrides-électriques de six places. Ces solutions, plus silencieuses et moins émettrices, répondent aux enjeux de transition écologique tout en s’alignant avec les attentes croissantes de l’opinion publique. Parfaitement adaptés aux vols courts, ces appareils viendront compléter les grandes lignes, en offrant une mobilité plus responsable et mieux intégrée aux territoires.
Une richesse technologique, humaine et locale à préserver
Les 500 aérodromes régionaux que comprend la France ne sont pas seulement des points d’entrée ou de sortie : ce sont des lieux d’innovation, de formation et de développement économique. Ils accueillent des entreprises aéronautiques, des ateliers de maintenance, des centres de formation de pilotes et participent activement à l’ancrage territorial de l’industrie aérienne.
« Ces aérodromes ce sont avant tout des emplois dans les territoires car quand ce type d’écosystème se développe en local, cela crée naturellement des emplois, bien rémunérés et intéressants qui sont bons pour nos régions à travers toute la France. » – Charles Aguettant
À l’heure où se dessinent les contours d’une aviation plus verte, plus connectée et plus inclusive, supprimer ces infrastructures locales serait prendre le risque de laisser des pans entiers du territoire français à l’écart des mobilités de demain. Au contraire, ces sites locaux seront décisifs pour tester et déployer les innovations qu’il s’agisse de drones logistiques d’avions légers autonomes ou encore de mobilité urbaine aérienne.
Conclusion : une aviation d’utilité publique
Souvent discrète, l’aviation d’affaires est pourtant un levier structurant, agile et responsable. Elle répond à des besoins concrets : transporter, soigner, connecter, former, innover. Elle ne concurrence pas les réseaux existants – elle les complète, les renforce, les prolonge.
Actrice de terrain, elle participe activement à la vitalité économique et sociale des territoires. Aujourd’hui engagée dans une dynamique forte de transformation – qu’il s’agisse de formation, d’innovation ou de décarbonation – la filière mérite d’être reconnue à sa juste valeur : celle d’un secteur essentiel, résolument tourné vers l’avenir et au service du pays.
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Retour sur l’épisode #1 consacré à l’aviation sanitaire !